Stéphane Dang prend le relais de Vincent Porteret au CREC IDF et au Cerfal

Vous venez de prendre vos fonctions de Délégué Régional du CREC (Comité Régional de l’Enseignement Catholique Ile-de-France).

Vous intégrez à ce titre le conseil d’administration et le bureau du réseau CFA Cerfal. Nous sommes ravis aujourd’hui de vous donner la parole. Pouvez-vous, tout d’abord, retracer en quelques mots les grandes lignes de votre parcours ?

J’ai réalisé toute ma carrière dans l’enseignement catholique : dans un premier temps, en tant qu’enseignant (agrégé) d’économie gestion puis comme cadre et cadre de direction. J’ai travaillé dans deux établissements à Paris, dans le 13e : au lycée Notre-Dame (groupe scolaire Saint-Vincent-de-Paul) et au lycée Le Rebours. Voilà donc 25 ans que j’interviens dans la formation en initial et en alternance auprès de publics de la troisième au master.

J’ai développé au cours de ces années une expertise qui pourrait se résumer ainsi : une expertise dans le domaine de la formation et de l’orientation (de la seconde au master), et une expertise du marché du travail autour de deux axes forts, l’insertion des jeunes et la relation école entreprise.

Mon cœur de métier est avant tout la formation professionnelle et technologique dans ses multiples aspects en particulier celui de l’orientation. La décennie 2010-2020 -j’y reviendrai- a été fortement marquée par la transformation de notre système éducatif en passant progressivement de la sélection à l’orientation des jeunes. Ma seconde expertise convoque mon parcours d’économiste puisqu’il s’agit de la connaissance du marché du travail et plus précisément des mécanismes d’ adaptation offre/demande. Avec mes équipes, sur le terrain, notre but a toujours été de réussir le projet de formation et l’insertion professionnelle du jeune dans une logique de performance des politiques publiques éducatives. Ma génération a été marquée par deux chiffres :  d’abord, par le taux de chômage des jeunes – les fameux 25 % des 15-25 ans –  et par les 150 000 décrocheurs scolaires. Nous sommes aujourd’hui à 100 000, mais c’est toujours beaucoup trop.  Je reprends là, l’idée du Pape François, celle de l’unicité de chaque personne. L’insertion professionnelle est un de nos devoirs humain et spirituel par rapport à ces jeunes dont nous avons la responsabilité.

Mais on ne réussit pas l’insertion des jeunes sans un travail avec les entreprises. Cette question de la relation école/entreprise, a toujours été au centre de notre travail éducatif. J’ai comme priorité la construction d’un partenariat fort avec l’entreprise pour en faire, non pas seulement un partenaire qui nous demande des stagiaires mais un partenaire, véritablement intégré au sein de l’école avec lequel on travaille sur les blocs de compétences et la découverte des métiers.

Il s’agit de casser ce qu’on appelle les rigidités du marché du travail grâce à une meilleure connaissance de l’école par les entreprises mais aussi en incitant nos formateurs et enseignants, à se rapprocher du monde du travail. Ce ne sont pas que des mots : aujourd’hui, les blocs de compétences définis avec les entreprises, sont déclinés en référentiels et donnent lieu à des évaluations et à la validation de certifications. C’est tout l’enjeu des années de 2022 à 2030.

Je travaille dans l’enseignement catholique depuis toujours, toutes les actions et tous les projets développés avec mes équipes ont été menés à travers un projet humain et spirituel, avec pour objectif le développement intégral du jeune. C’est la base d’une pratique du management qui, au quotidien, irrigue par capillarité toutes nos relations avec les jeunes. Notre responsabilité est de les accompagner dans leur formation, de travailler avec eux sur leur professionnalisation, leur projet d’orientation en donnant un sens décliné à travers la doctrine sociale de l’église. Pour moi, l’éducation est une ambition, la formation son devenir. C’est un éternel mouvement au sein de nos communautés, un mouvement qui anime chacun de nous pour accompagner les jeunes avec qui on chemine à travers les projets éducatifs très riches au sein de tous nos établissements.

Quel regard portez-vous sur le système éducatif français ? Quelle analyse en feriez-vous ? 

La décennie 2010-2020 a été porteuse de profonds changements, qui sont l’aboutissement de transformations institutionnelles et structurelles initiées depuis plus de 50 ans. Loin d’être exhaustif, je retiens deux transformations. La première est l’adaptation des politiques éducatives avec la massification de l’enseignement avec, par exemple, le collège unique, l’ouverture des Bacs professionnels en 85, l’ambition des 80 % d’une classe d’âge .. La France est passée d’une logique malthusienne de 15 %, 20 %, 30 % d’une classe d’âge au Bac à sa généralisation, diplôme qui est devenu aujourd’hui un élément de formation conduisant au Bac+3 ou Bac+5. L’autre changement fondamental est l’aboutissement du processus d’intégration de la France dans l’Union Européenne, et plus largement dans la mondialisation, avec la Déclaration de Bologne dans les années 2000, qui isole l’exception française du Bac +2 pour se fondre dans une harmonisation européenne et mondiale de l’éducation. Deux changements ont marqué cette décennie selon moi : Parcoursup (loi ORE) et la réforme du Bac qui entérinent le fait que les jeunes choisissent l’enseignement supérieur avant l’obtention de leur bac. La priorité a été donnée à l’orientation, bien plus qu’à la sélection qui se fera plus tard, sur le marché du travail, en fonction des compétences des jeunes.

Quels sont les objectifs, les axes de travail que vous souhaitez mettre en œuvre au CREC ?

On est aujourd’hui à la croisée des chemins. Pour 2020-2030, notre objectif en Île-de-France est de développer un projet éducatif de réseau, ancré dans une dynamique territoriale. Notre réseau doit avoir la capacité à répondre aux besoins d’emploi et d’insertion de notre territoire. Ce territoire s’inscrivant lui-même dans une profonde modification liée au Grand Paris.

Notre deuxième objectif concerne plus la méthode. Pour renforcer notre réseau, il s’agit pour moi de mettre en œuvre une logique de management ascendante qui permet de construire ce réseau en prenant en compte des besoins de chaque acteur et notamment ceux des établissements. Notre enjeu est de créer une dynamique montante, de la piloter et de la coordonner pour que chaque acteur puisse trouver sa place dans cette transformation.

Je profite de la tribune que le Cerfal m’offre ici pour donner rendez-vous à tous les acteurs de l’enseignement catholique en Île-de-France. Je compte aller le plus rapidement possible à leur rencontre. Cette première étape donnera lieu à une synthèse qui reflètera le plus fidèlement possible la réalité du terrain.

Défilement vers le haut